Ma vie parmi les ombres
Hélène A. nous offre un bref passage textile d'un roman de 629 pages, qu'elle découvrit en faisant la lecture chaque semaine à une amie malade et décédée depuis. Elle recommande avec vigueur Richard Millet, que je ne connais pas: c'est un grand écrivain contemporain, digne d'être comparé à Proust, bien que cet extrait ne puisse en rendre compte:
« Il faut imaginer Marie dans son manteau noir en bure de laine mouflonne, le cou protégé par une cravate écossaise en renard de Patagonie, ultime cadeau d’Antoine, la tête couverte d’un chapeau de petite forme en tagal noir et muni d’une voilette qu’elle rabaissait lorsqu’ils croisaient des poilus harassés et hagards, les pieds chaussés de souliers à deux brides en chevrette glacée, vêtements que j’ai retrouvés dans l’armoire. Je les ai montrés à Jeanne, qui m’a dit que Marie les avait portés, cet hiver-là seulement, les ayant commandés aux Dames françaises, grands magasins de Limoges, pour aller s’incliner sur la sépulture de son mari.»
Richard Millet, Ma vie parmi les ombres, nrf Gallimard, octobre 2003 (page 96).
Le tagal est une "fibre végétale tirée de certains palmiers" ( cf Petit Robert) précise Hélène.
Merci Hélène A. pour cette description qui rappelle que le textile s'inscrit dans une dimension historique.