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dentelles d'encre / Ink Lace
25 juin 2006

Kimono - la suite

Vint ensuite la pose des ornements sur mes cheveux, enroulés autour d'un morceau de soie rouge que l'on apercevait à l'endroit où le chignon était fendu. Un ruban rouge ornait aussi déjà le devant. Restait à piquer les épingles, de corail, de jade, d'argent délicatement gravé du blason de l'okiya, ainsi que les peignes d'écaille qu'une maiko ne porte qu'à cette occasion, pendant les trois premiers jours de ses débuts : les chirikan.

J'étais prête à me draper dans mes sous-vêtements. Deux rectangles de coton blanc, le premier que l'on enroule autour des hanches, l'autre autour de la poitrine afin de l'aplatir et de rendre la ligne du kimono plus fluide. Ensuite j'enfilai une sorte de jupon moulant, puis des culottes longues afin de préserver ma pudeur au cas où les plis de devant de mon kimono viendraient à s'ouvrir.

Par-dessus tout ce linge, je passai un naga-jugan, sorte de blouse flottante qui épouse les lignes du kimono, puis un naga-juban, qui couvrait toute ma hauteur. Le mien était en soie teinte à points noués avec un motif en éventail et brodé d'une multitude de fleurs.

Sur ce naga-jugan est cousu un col qui dépasse du kimono : l'eri. Une bande de tissu épais, longue et étroite, de couleur rouge, brodée de fils d'or et d'argent. Plus on est jeune, plus modeste est la broderie, et plus le rouge du col, symbole de l'enfance, est visible. À mesure que l'on gagne en maturité, l'eri s'orne de motifs, jusqu'au jour où le rouge disparaît tout à fait quand la maiko devient geiko au cours de la cérémonie dite du «retournement de col». Alors l'eri rouge est remplacé par un eri blanc.

On me confectionnait cinq cols par an, deux pour l'été en gaze de soie légère et trois pour l'hiver, en crêpe. Chacun coûtait la modique somme de 2 000 euros. Je les ai conservés dans ma collection personnelle. Mon premier, celui que j'ai porté lors de mon omisedashi, était orné d'un motif classique en fils d'or et d'argent représentant le palanquin du prince Genji.

Enfin mon habilleur posa sur mes épaules le kimono à blason de la maiko, l'hikisuri. Une robe en soie noire décorée d'un dessin impérial représentant des fleurs. Elle était frappée du blason de l'okiya à cinq endroits différents : sur le dos, sur chaque sein et sur les deux manches. Au Japon, chaque famille possède un blason, appelé kamon, qui figure sur les kimonos de cérémonie. Celui des Iwasaki représente une campanule à cinq pétales.

Quant à mon obi, c'était une véritable oeuvre d'art : cinq années avaient été nécessaires à sa confection. Un damas brodé d'un motif tout en nuances de feuilles d'érable dorées. Elle mesurait près de quatre mètres et avait coûté une fortune. Elle était maintenue en place par l'obi-age, une longue et étroite bande de soie - la mienne était rouge et frappée de notre blason -, et ses extrémités tombaient jusqu'au sol.

Mon sac à main n'était guère différent de celui que je portais quand j'étais minarai. Il contenait mon éventail, une serviette de poche, un rouge à lèvres, un peigne et un petit coussin. Chacun de ces articles était enfermé dans une pochette de soie rouge calligraphiée en blanc à mon prénom, Mineko.

- Ma vie de geisha, Mineko Iwasaki

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