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dentelles d'encre / Ink Lace
27 juillet 2007

'Ma navette'

Ma navette

                    

Un canut qu'un temps de disette
        Forçait à chanter tous les jours
        Disait à sa chère navette
        Objet de ses meilleurs amours :
        La morte , hélas ! a remplacé la presse
        Où ton travail entretient mon bras,
        Et aujourd'hui que nous n'avons plus de presse
        Repose-toi mais ne t'engourdis pas.
        Un jour que j'étais en chômage
        Un brave canut de Lyon
        Me rencontrant à la Déserte
        M'emmena droit au Gourguillon.
        Fier d'être assis sur sa noble banquette,
        Dans l'art de la soie je marchais à grand pas.
        Ca n'est plus cela, ô ma chère navette,
        Repose-toi mais ne t'engourdis pas.
        Dans cette ville où, tout de même,
        La Fabrique est le plus bel art,
        Des hommes, trop pleins d'esprit,
        Ont, par malheur, inventé la Jacquard.
        Alors depuis nous laissons la clinquette
        Le jacquardié remue aussi les bras,
        Et comme nous, il dit à sa navette :
        Repose-toi mais ne t'engourdis pas.
        Tu as fait assez pour la Fabrique,
        Tu as su apprendre, dans ma main,
        Aux apprentis de ma boutique,
        Fabriquer du gros de Naples et du satin.
        Mais quand je viens de monter un florenc ,
        Que même mon marchand met à bas,
        Je vois toujours une lueur d'espérance,
        Repose-toi mais ne t'engourdis pas.
        Je peux passer partout sans blâme,
        Aux marchands j'ai rendu leur poids;
        Je n'ai pas humidifié leur trame,
        Malgré la gêne où j'ai été cent fois.
        Si tu as parfois, glissant sous la façure,
        Dégringolé de haut en bas,
        Tes fils jamais n'en ont fait d'écorchures;
        Repose-toi mais ne t'engourdis pas.

      

Louis-Etienne  Blanc (1777-1854)

Sauvé, encore, avant fermeture du Conservatoire des Vieux Métiers du Textile.

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Commentaires
C
Bonjour, je suis lyonnaise d'origine, et je suis ravie d'avoir découvert, dans ce texte, une référence au Gourguillon, qui est une montée assez raide menant du quartier St Jean à celui de Saint Just, sur la colline de Fourvière. J'ai fait cette montée, (et la descente également!)presque chaque jour de mon adolescence, pour me rendre au lycée et en revenir. Parfois, les jours de paresse, j'étais infidèle au Gourguillon et je lui préférais la "ficelle" qui est le funiculaire qui permet de faire le même parcours sans se fatiguer.<br /> Accessoirement, je vous indique que je publie quelques poèmes sur mon blog, semés au milieu de pages consacrées en majorité au point de croix.<br /> Amicalement, Clarélis
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