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dentelles d'encre / Ink Lace
27 novembre 2005

La Complainte des fileuses

Urraca nous propose la complainte des fileuses, tirée du roman Le Chevalier au lion (Yvain) de Chrétien de Troyes, dans laquelle les fileuses, exploitées par un géant dont le héros les délivrera, se plaignent de leurs conditions de vie difficiles.

Voici la version en ancien français :

Et a travail et a mesaise;
Janmais n'arons riens qu'il nous plaise.
Mais mout dis ore grant enfanche,
Qui parlai de la delivranche,
Que janmais de chaiens n'istrons;
Tousjours mais de soie ouverrons,
Ne ja ne serons mix vestues;
Tousjours serons povres et nues,
Et tousjours fain et soif arons;
Ja tant gaaignier ne sarons
Que mix en ayons au mengier.
Du pain avons a grant dangier,
Petit au main et au soir mains,
Que ja de l'oevre de ses mains
N'ara chascune pour lui vivre
Que .iiii. deniers de la livre;
Et de che ne porrons nous pas
Assés avoir viande et dras,
Car qui gaaigne la semaine
Vint sols n'est mie hors de paine.
Et bien sachiés vous a estours
Que il n'i a chele de nous
Qu'il ne gaaigne .xx. sols ou plus.
De che seroit riches uns dus!
Et nous sonmes en grant poverte,
S'est riches de nostre deserte
Chil pour qui nous nous traveillons.
Des nuis grant partie veillons
Et les jours tous pour gaagnier,
Qu'il nous manache a mehaignier
Des menbres quant nous reposons;
Et pour che reposer n'osons.Mais que vous yroie contant?
De mal et de honte avons tant
Que le quint ne vous en sai dire.


Une version (incomplète) en français moderne :

Toujours drap de soie tisserons
Jamais n'en serons pas mieux vêtues,
Toujours serons pauvres et nues
Et toujours faim et soif aurons.
Jamais tant gagner ne saurons
Que mieux en ayons à manger.
Du pain avons à partager
Au matin peu et au soir moins.
Jamais de l'oeuvre de nos mains
N'aura chacune pour son vivre
Que quatre deniers de la livre.
Et de ce ne pouvons-nous pas
Assez avoir viande et draps;
Car, qui gagne (dans) la semaine
Vingt sous, n'est mie hors de peine.
Et sachez vraiment a estrouz
Qu'il n'y a celle d'entre nous
Qui ne gagne vingt sous au plus:
De cela serait riche d'un duc!
Et nous sommes en grande poverte,
S'enrichit de notre desserte
Celui pour qui nous travaillons.
Des nuits grande partie nous veillons
Et tout le jour pour y gagner.
On nous menace de rouer
Nos membres quand nous nous reposons;
Aussi reposer nous n'osons.

Contribution d'Urraca

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Commentaires
M
Ce texte est vraiment magnifique<br /> Merci Urraca<br /> Mousie
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